Source : La Presse

18 novembre 2024
Parlant sans ambages d’une « crise humanitaire », le RAPSIM reconnaît que la situation est difficile pour tout le monde et n’a pas de réponse facile, mais argue que « le communautaire ne peut pas être le seul au front ».

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

Les signes ne mentent pas : l’hiver sera particulièrement difficile pour les sans-abri, estime le Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal (RAPSIM). L’organisme sonne l’alarme face au manque de places d’hébergement.

« À combien d’engelures, d’amputations et de décès ferons-nous face cet hiver ? », s’inquiète Maryane Daigle, organisatrice communautaire au RAPSIM.

Même s’il est rehaussé en prévision du temps froid, le nombre de places dans les refuges ne saura répondre aux besoins accrus pendant cette période critique, craint l’organisme communautaire. « Un grand nombre de personnes en situation d’itinérance seront contraintes de rester au froid ou dans des situations dangereuses, faute de places d’accueil », soutient Mme Daigle.

Maryane Daigle, organisatrice communautaire au RAPSIM

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Mme Daigle a fait valoir mardi que même le scénario le plus optimiste de 300 nouvelles places serait insuffisant. Le RAPSIM demande donc aux gouvernements d’agir « selon leur responsabilité populationnelle ». Interrogée à savoir quels acteurs devaient en faire plus, Maryane Daigle a surtout souhaité que les différents paliers de gouvernement « arrêtent de se renvoyer la balle ».

À la mi-octobre, La Presse révélait que le Bureau du coroner avait recensé pas moins de 72 morts parmi la population itinérante du Québec en 2023, comparativement à seulement une vingtaine par année de 2019 à 2021.

Le RAPSIM parle d’une « crise humanitaire ». L’organisme reconnaît que la situation est difficile pour tout le monde et qu’il n’y a pas de réponse facile. Mais « le communautaire ne peut pas être le seul au front », insiste-t-il.

Le RAPSIM n’était pas en mesure de chiffrer ses demandes de façon plus précise, mardi. Mme Daigle estime toutefois qu’un millier de personnes – « et même peut-être plus » – risquent de se retrouver dans la rue cet hiver.

Pour pallier la crise dans l’immédiat, elle n’hésite pas à tourner son regard vers la période pandémique, quand des mesures d’urgence ont été mises en place. Mobiliser le personnel des CIUSSS et transformer temporairement des hôtels en refuges figurent au nombre des actions qui pourraient être mises en place.

Le RAPSIM s’inquiète surtout de voir différentes instances s’engager dans l’autre sens. Il fait état d’une « hostilité » croissante envers les personnes sans-abri. Mme Daigle regrette également que des lieux dits « informels », comme les entrées de commerces et les stations de métro, leur ferment leurs portes.

Montréal veut de l’aide

La mairesse de Montréal, Valérie Plante, approuve la sortie des organismes communautaires. « Je comprends leurs préoccupations, a-t-elle réitéré mardi. Et c’est très important pour moi de dire aux gouvernements provinciaux et fédéraux : ‟Trouvez une solution.” »

Valérie Plante

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

Son administration appelle les gouvernements à débloquer « tout de suite » les 100 millions de dollars découlant d’un fonds de 250 millions annoncé par Ottawa en septembre 2024. « On attend encore les sommes et les sites qui pourraient être ouverts à court terme », a insisté Mme Plante.

De son côté, le cabinet du ministre responsable des Services sociaux, Lionel Carmant, a réitéré mardi sa volonté de conclure une entente avec le fédéral. Des détails restent toutefois à fignoler, notamment en lien avec la reddition de comptes et les conditions qu’Ottawa souhaite imposer pour l’utilisation des sommes versées.

Pour « faire accélérer les choses », le ministre Carmant compte s’entretenir cette semaine avec son homologue fédéral, Sean Fraser, a-t-on indiqué.

Valérie Plante a rappelé qu’encore la semaine dernière, une personne itinérante est morte dans l’arrondissement de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve. Deux autres ont aussi été retrouvées mortes récemment au centre-ville. « On ne peut pas accepter, dans une société riche comme la nôtre, que des gens meurent dans la rue », a indiqué la mairesse.

N’empêche, « les rues de Montréal ne peuvent pas devenir un logement ou un hôpital à ciel ouvert, et c’est la même chose pour le métro », a observé Mme Plante. Elle faisait référence au reportage de La Presse, qui rapportait mardi que la Société de transport de Montréal (STM) avait fermé l’édicule du métro Atwater au square Cabot pour l’hiver, en raison de problèmes de consommation, de méfaits et d’incivilités.

« Ça nous prend de vraies solutions humaines et dignes », a soutenu Mme Plante, en appelant à concentrer les efforts sur la lutte contre l’itinérance, mais aussi contre la toxicomanie et les problèmes de santé mentale.

­­— Avec Isabelle Ducas, La Presse