À peine sortie du local de l’Action jeunesse de l’Ouest-de-l’Île, Athéna Quesnel-Revelakis est abordée par deux résidents qui se baladent à vélo, la saluent d’un «high-five» avant de repartir aussitôt.
La jeune femme de 24 ans est connue dans tout le quartier de Pierrefonds-Roxboro, où elle est travailleuse de rue. Depuis maintenant quatre ans, elle sillonne son territoire de 40 kilomètres de long pour rencontrer les habitants.
Que ce soit une maman avec trois enfants qui ne sait pas où aller après avoir perdu son logement, un jeune qui vit des situations d’agressions sexuelles, mais aussi tout simplement pour briser l’isolement d’une personne: la travailleuse de rue est sur tous les fronts.
«J’aime beaucoup dire que mes semaines se ressemblent, mais que mes jours ne se ressemblent pas», avoue-t-elle avec un petit rire, en préparant pour sa dernière intervention de la journée, une distribution de préservatifs.
PARÉE À TOUT
Dans son imposant sac à dos bleu, la jeune femme est prête à toute éventualité: des tests de grossesse, une trousse de premiers soins, mais aussi des tests de fentanyl, de la naloxone, des brochures de sensibilisation, ou encore des collations, des bouteilles d’eau et des billets d’autobus.
Les jeux de cartes sont toutefois sa botte secrète, car ils sont un bon moyen de créer le contact.
«Des fois, le fait de ne pas avoir à regarder quelqu’un dans le blanc des yeux, ça peut tellement calmer la situation et la personne s’ouvre tranquillement», souligne-t-elle.
Attablée au Tim Hortons du coin, en balade dans un parc du quartier, postée devant l’école ou encore assisse dans un bar où se retrouvent des jeunes le soir, la travailleuse de rue fait partie du décor.
Il peut aussi lui arriver d’organiser des activités comme des barbecues pour encourager la vie communautaire et faciliter la cohabitation dans le quartier.
CRÉER UN LIEN
À Montréal, ils sont une cinquantaine de travailleurs de rue à parcourir le territoire, et près de 400 à travers le Québec.
«Les travailleurs de rue sont des bottins de ressources sur deux pattes. Ils connaissent leur quartier, donc ils peuvent diriger la personne vers un service spécialisé parce qu’ils ont d’abord créé un lien de confiance», mentionne Audrey Sirois, directrice du Regroupement des organismes communautaires québécois pour le travail de rue (ROCQTR).
Avec les besoins actuels au Québec, les travailleurs de rue reçoivent énormément d’appels pour des demandes de soutien.
«Ça nous prendrait au moins le double de ressources dans chacune des organisations pour être capables de répondre à tout le monde», indique Mme Sirois.
Tous les ans, chaque travailleur de rue entretient en moyenne 588 contacts, que ce soit avec une personne en situation d’itinérance, le dépanneur du coin ou un travailleur social.
«Ça crée un filet de sécurité pour la communauté, juge Athéna Quesnel-Revelakis, qui intervient principalement auprès des jeunes. Tout le monde peut avoir besoin d’un travailleur de rue. Le but c’est de créer un lien. Si jamais il y a un besoin qui émerge, on est là et la personne sait vers qui se tourner.»
Les travailleurs de rue, dont la profession existe depuis 40 ans au Québec, peuvent au moins compter sur un financement du ministère de la Sécurité publique, qui donne de l’argent à 40 organismes dans ce domaine depuis janvier 2023 et pour une durée de trois ans renouvelables.
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